Lettre ouverte à la FNCS

La Fédération Nationale des Centres de Santé a récemment ardemment défendu les centres « low-cost ». La présence, comme trésorier, de Patrice de Poncins Addentis au bureau de cette fédération n’est sans doute pas étrangère à cette prise de position. Tous les syndicats de chirurgiens-dentistes ont décidé de lui répondre d’une seule voix.

Monsieur le Président, Docteur Richard LOPEZ, Preésident Fédération Nationale des Centres de Santé.

C’est avec étonnement et consternation que les représentants des chirurgiens-dentistes ont reçu les deux communiqués de la FNCS des 7 et 13 mai 2013. En effet, nous ne comprenons pas votre position sans nuance à vouloir défendre des structures qui sont un déni de santé publique.

La vision du médecin qui semble vous avoir guidé dans votre appréciation reste celle de l’exercice de la médecine.

Aujourd’hui, 98% des chirurgiens-dentistes sont conventionnés dans un secteur unique.

2/3 de leur activité sont constitués d’actes de prévention, soins, chirurgie, aux tarifs opposables très sous-évalués au regard des obligations de qualité-sécurité et de l’évolution des techniques. Toute la population peut donc financièrement, contrairement aux idées reçues, accéder à ces soins. Et nous savons toutes et tous que, plus les soins sont réalisés précocement, moins les coûts induits sont élevés.

1/3 de l’activité (prothèse, orthodontie, actes médicaux non remboursables) est constitué d’actes à honoraires libres et le remboursement, quand il existe, n’a pas évolué depuis 25 ans. Les tarifs de remboursement ne couvrent d’ailleurs même pas le coût de fabrication des dispositifs médicaux sur mesures ou orthèses.

Enfin, depuis 2000, nombre de ces actes à honoraires libres sont devenus opposables pour les bénéficiaires de la CMU-C : là encore, les tarifs sont sous évalués, et n’ont augmenté qu’une seule fois en 13 ans, il y a 7 ans.

Un cabinet dentaire, qu’il soit libéral ou centre de santé, doit donc, pour pouvoir soigner tous les patients et réaliser tous les actes, s’appuyer sur des actes non opposables, les actes à tarifs réglementés ne permettant pas à eux seuls de répondre aux obligations légales et règlementaires d’équipement des cabinets, et autres frais et charges, le tout représentant aujourd’hui 65 à 70% en moyenne des honoraires perçus.

Au fil des années, la stagnation des tarifs réglementés opposables et l’évolution exponentielle des coûts ont induit une hausse du tarif des actes à honoraires libres, atteignant des limites économiques difficilement supportables par ceux qui n’ont pas une couverture complémentaire correcte.

Seule solution, portée depuis des années par l’ensemble des syndicats dentaires : revaloriser les actes de soins précoces, conservateurs et chirurgicaux à une valeur qui permettrait à ceux qui voudraient ne pratiquer que ces actes de payer leurs frais de structure, leurs charges et d’en vivre. Cela suppose au moins un doublement, voire un triplement des tarifs de ces actes. Une telle politique permettrait une réelle baisse des honoraires libres. Parallèlement, une meilleure prise en charge des prothèses, de l’orthodontie et des actes non remboursables s’impose.

Ce rappel permet de comprendre la perversité induite de ce système : il suffit en effet de sélectionner certains actes plus rentables ou de réaliser ces actes en nombre pour changer la donne économique.

C’est ce modèle économique que mettent en œuvre aujourd’hui les centres dits « low-cost » (ou le tourisme dentaire à l’étranger basé sur le même principe). En ne réalisant que des actes à honoraires libres et en écartant les soins réalisés à perte, ces structures peuvent minorer leurs tarifs. En sélectionnant les patients, en jouant sur la solvabilisation possible des actes (CMU-C ou complémentaires santé à prestations élevées) en se limitant à ces seuls actes et en les multipliant, soigner à prix modéré peut devenir rentable.

Il est insupportable d’en faire des chantres de la santé publique !

C’est injuste vis-à-vis des chirurgiens-dentistes libéraux ou salariés qui, au quotidien, soignent toute la population, enfants compris, en cherchant avant tout à préserver l’intégrité des dents. Pour l’affirmer, nous nous appuyons sur les statistiques de dépenses dentaires.

La prévention et l’éducation thérapeutique mises en place par la profession, bénévolement d’abord, puis avec le concours de l’assurance maladie et des collectivités territoriales, l’incitation faite aux jeunes à venir traiter précocement les dents, ont permis de diviser par trois le nombre de caries en 30 ans. Voilà la vraie vision de la santé publique que nous défendons, chirurgiens-dentistes libéraux ou salariés !

C’est également la vôtre, nous en sommes convaincus … voilà pourquoi, il est impératif qu’ensemble nous condamnions de telles pratiques déviantes qui existent en votre sein, comme chez certains libéraux. Tous ensemble, nous devons tout faire pour les éradiquer. Et nous devons conjointement réclamer aux pouvoirs publics la mise en place d’une vraie politique de santé publique visant à restructurer le modèle économique de la chirurgie dentaire pour préserver l’accès aux soins et la qualité/sécurité des soins.

Nous vous prions d’accepter, Monsieur le Président, l’expression de nos salutations distinguées.

Pour la CNSD
Dr Catherine MOJAÏSKY Présidente

Pour le SNCO
Dr Guy LE TOUX Président

Pour la FSDL
Dr Patrick SOLERA Président

Pour le SSFODF
Dr Claude BOURDILLAT-MIKOL Présidente

Pour le SFCD
Dr Béatrice GADREY Présidente

Pour l’UJCD-UD
Dr Philippe DENOYELLE Président

Pour le SNCDCS
Dr Dominique JASSERON Présidente
Dr Fabien COHEN Secrétaire Général

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